Tête et corps

Par Platon

Or, les révolutions divines qui étaient au nombre de deux, les dieux jeunes, pour imiter la figure de l’univers qui était arrondie, les enchaînèrent dans un corps de forme sphérique, celui que nous appelons la « tête », partie qui est la plus divine et qui règne en nous sur toutes les autres parties ; et à la tête les dieux ont donné ; comme serviteur, le reste du corps qu’ils ont rattaché à elle, dans l’idée qu’elle devrait avoir part à tout ce qu’il pouvait y avoir de mouvements. Or pour éviter que, roulant sur la terre qui présente des saillies et des trous de toutes sortes, la tête ne se trouvât embarrassée pour franchir les unes et pour s’extraire des autres, ils lui donnèrent le corps comme véhicule et comme moyen pour faciliter son transport. De là vient que le corps s’est allongé, et que lui ont poussé quatre membres qu’on peut étendre ou courber, instruments fabriqués par un dieu pour assurer son transport. S’en servant comme outil de préhension et comme moyens d’appui, le corps acquit la capacité de cheminer en tous lieux, transportant au sommet de nous la demeure de ce qu’il y a de plus divin et de plus sacré en nous.

Platon, Timée Critias, trad. Luc Brisson, Paris, GF Flammarion, 2017, 44d-44a, pp.139-140.

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