Attendre
Attendre, se rendre attentif à ce qui fait de l’attente un acte neutre, enroulé sur soi, serré en cercles dont le plus intérieur et le plus extérieur coïncident, attention distraite en attente et retournée jusqu’à l’inattendu. Attente, attente qui est le refus de rien attendre, calme étendue déroulée par les pas.
Depuis quand attendait-il ? L’attente est toujours l’attente de l’attente, reprenant en elle le commencement, suspendant la fin et, dans cet intervalle, ouvrant l’intervalle d’une autre attente. La nuit dans laquelle il n’est rien attendu, représente ce mouvement de l’attente.
L’impossibilité d’attendre appartient essentiellement à l’attente.
Il se rendit compte qu’il n’avait écrit que pour répondre à l’impossibilité d’attendre. Ce qui était dit avait donc rapport à l’attente. Cette lumière le traversa, mais ne fit que le traverser.
Depuis quand avait-il commencé d’attendre ? Depuis qu’il s’était rendu libre pour l’attente en perdant le désir des choses particulières et jusqu’au désir de la fin des choses. L’attente commence quand il n’y a plus rien à attendre, ni même la fin de l’attente. L’attente ignore et détruit ce qu’elle attend. L’attente n’attend rien.
Quelle que soit l’importance de l’objet de l’attente, il est toujours infiniment dépassé par le mouvement de l’attente. L’attente rend toutes choses également importantes également vaines. Pour attendre la moindre chose, nous disposons d’une puissance infinie d’attendre qui semble ne pouvoir être épuisée.
« L’attente ne console pas. » – « Ceux qui attendent n’ont à être consolés de rien. »
Maurice Blanchot, L’attente, l’oubli, Paris, Gallimard, coll. « L’imaginaire », 1962, p.16 ; pp.38-39.